Le directeur général de l’agence de l’informatique de l’Etat (ADIE) s’est prononcé sur la situation de la structure qu’il dirige dans cet entretien accordé à L’Observateur. Extrait…

Vous êtes nommé directeur général de l’Agence de l’informatique de l’Etat (ADIE) depuis quelques mois, quel est l’état des lieux?

J’ai été nommé depuis le mois d’août 2014 à la tête de l’agence de l’informatique de l’Etat (ADIE), une agence transversale qui travaille avec l’ensemble des structures de l’Etat. Nous intervenons dans les ministères, les directions générales, les agences, les universités, les collectivités locales etc. L’ADIE a deux activités principales : l’exploitation d’un réseau d’Etat et la mise en place d’un système d’information pour tout le gouvernement. L’agence a déployé un réseau informatique constitué essentiellement d’un réseau en fibre optique et d’un réseau Cdma qui, aujourd’hui, est dans 32 capitales départementales. C’est un réseau qui a été construit depuis le début des années 2000, avec la phase1 du projet E-gov qui a permis au Sénégal d’avoir presque 500 km de fibre optique. Ensuite, on a eu la seconde phase du projet E-gov, avec 1000 Km de fibre optique que je viens de réceptionner. J’ai signé la troisième phase du projet E-Gov, qui permettra au Sénégal d’avoir plus 3000 Km de fibre optique. Ce qui permet à l’Etat du Sénégal d’avoir une certaine indépendance en matière de connectivité, mais surtout de réussir la transition de l’analogique au numérique, qui devrait s’opérer au mois de juin 2015. L’autre activité de l’ADIE, c’est la mise en place d’un système d’information, avec surtout la dématérialisation des procédures administratives. Nous avons par exemple le projet Télédac, qui a permis au Sénégal de pouvoir dématérialiser le permis de construire. Il faut savoir qu’avant, le permis de construire, pour des dossiers simples, cela pouvait aller jusqu’à un ou deux ans. Mais grâce à ce projet, nous pouvons aujourd’hui avoir le permis de construire, pour les dossiers simples, en mois de 28 jours et pour les dossiers complexes, en moins de 40 jours. Quand je suis arrivé, la première chose que j’ai faite, c’est le diagnostic de l’existant. Parce que l’agence mène beaucoup d’activités. Elle distribue du matériel, développe des logiciels, fournit de la connectivité. Donc, il fallait diagnostiquer toutes ces activités pour voir comment les services sont délivrés au niveau de l’administration. Ce qui m’a un peu étonné, c’était un manque criant de procédures documentées. Je n’ai pas trouvé en place un manuel de procédure. Ce qui est dommage pour une agence aussi stratégique. Sachant que beaucoup d’administrations ne connaissent pas nos services, j’ai lancé le projet «Catalogue de services». Je suis en train de faire le tour des ministères, des administrations en général, pour leur proposer ce qu’on peut leur délivrer en matière de prestations informatiques. Je veux redorer le blason de l’ADIE, pour que nous puissions jouer ce rôle de premier plan que nous devrions jouer, c’est à dire d’implémenter des solutions pour que notre administration puisse être moderne et performante.

Et quels sont les grands projets en vue au sein de l’ADIE?

J’ai proposé au conseil de surveillance de l’ADIE un nouvel organigramme. J’ai créé une direction de la sécurité des systèmes d’information de l’Etat, qui est essentielle en matière d’informatique. Parce que nous ne pouvons pas déployer des applications, parfois critiques, utilisées par des administrations sans qu’on ait une vision claire ou une politique globale de sécurité. J’ai aussi lancé le projet de l’infrastructure de gestion de clé(s) nationale(s) et le CERT. En plus, j’ai lancé la seconde phase du projet «Girafe», qui est le projet du fichier unifié de la Fonction publique. Ce projet, qui a permis de faire l’audit physique biométrique de l’administration, nous a permis d’avoir un fichier unifié de toute l’administration, de maîtriser notre masse salariale, mais surtout de nettoyer tous ceux qui ne devraient pas figurer sur ce fichier. Ce travail a été fait avec comme principal acteur le ministère de la Fonction publique, et l’ADIE comme acteur technique. Avec l’Union européenne, j’ai lancé la seconde phase de ce projet, qui va s’étendre aux universités, aux agences et corps diplomatiques, qui doivent, eux aussi, être enrôlés dans ce fichier unifié. Nous avons pu aussi connecter le fichier unifié avec la Solde. Et dans les jours prochains, toute personne qui ne figure pas sur ce fichier unifié, ne pourrait pas être payée. Un autre projet, c’est la généralisation du télédac. A mon arrivée, le télédac, c’était pour le département de Dakar. Je l’ai étendu à toute la région de Dakar, avec les départements de Guédiawaye, Pikine et Rufisque. Ces trois départements ont été connectés, en moins de trois mois, à la plateforme télédac. Et aujourd’hui, les services de l’Urbanisme de ces départements et les collectivités locales peuvent délivrer le permis de construire avec la plateforme télédac. Le télépaiement a aussi été intégré dans l’application et je compte l’étendre à tous les projets de dématérialisation, ce qui permettra à l’Etat d’avoir un meilleur taux de recouvrement. J’ai aussi permis à l’école nationale d’administration d’avoir un portail qui permettra aux candidats de pouvoir désormais s’inscrire en ligne. J’ai également lancé le projet d’uniformisation des sites Web de l’administration avec une charte graphique commune. La communication sur le Web sera mieux prise en charge et l’ADIE appuiera toutes les structures. Le Président Macky Sall nous a instruit(s) de tout faire pour réduire la facture du téléphone et de l’internet. Avant l’arrivée du Président Macky Sall à la magistrature suprême, l’Etat du Sénégal payait plus 22 milliards FCfa en téléphone et Internet. Ce qui constitue pour notre pays une somme très conséquente. Nous sommes en train de travailler à faire baisser cette facture. Je vais bientôt lancer le déploiement de terminaux mobiles qui seront dans notre réseau et ils auront une connexion 3G. Avec ce réseau, les appels seront gratuits. J’ai entamé les négociations avec l’Autorité de régulation des télécommunications et des postes (Artp) pour que notre réseau puisse être connecté aux autres opérateurs. Cela va davantage permettre de réduire les factures de l’Etat. Le principal chantier que j’ai aujourd’hui pour moderniser l’administration, c’est de dématérialiser le maximum de procédures, notamment avec l’état civil, le casier judiciaire…, ce qui est un vieux problème. Parce qu’aujourd’hui, quelqu’un qui est né à Tambacounda est obligé d’aller là-bas pour avoir son extrait de naissance. Ce qui, aujourd’hui, est anormal, voire inadmissible. Aujourd’hui, avec les services des ministères concernés, nous sommes en train de travailler pour trouver une solution. On a répertorié plus de 700 procédures, tous les ministères confondus. Je me suis donné comme mission de dématérialiser le maximum de procédures administratives. Et c’est à partir de ce moment que nous pourrons réellement parler d’une E-administration. Et nous demandons à tous les ministères une meilleure collaboration.

Vous avez parlé de sécurisation du système informatique de l’Etat, mais récemment, on a parlé de piratage du site Web. Est-ce que vous pouvez expliquer ce qui s’est passé ?

Très souvent, l’ADIE ou même les sites du gouvernement, subissent des attaques. Le danger, c’est que ces services-là puissent être indisponibles pendant plusieurs jours ou plusieurs heures. Dans le cadre de ce piratage-là, nous avons connu une attaque qui a fait que le site Web de l’ADIE, qui est public, et qui n’a aucune information sensible, a été indisponible pendant à peu près 30 minutes. Nos équipes et moi-même avons pu régler le problème en moins d’une heure. On a pu gérer cet incident et le clore rapidement pour permettre aux citoyens d’avoir l’information disponible sur notre site Web. Ce sont des choses qui arrivent très souvent. Maintenant, il faut savoir riposter rapidement. De manière générale, la sécurisation des systèmes d’information est davantage renforcée et assurée par l’ADIE.

Par : Sophie Barro
Source : L’Observateur / iGFM

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