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maroc_telecom_secteurL’ANRT vient de lancer le plan national haut débit et très haut débit. Les appels d’offres pour les licences 4G seront lancés à l’automne 2012, les attributaires seront connus début 2013. Le partage d’infrastructures entre opérateurs deviendra obligatoire et les prix seront régulés par l’Agence.

 

 

L’Anrt vient de tenir son premier Conseil d’administration sous l’ère du gouvernement Benkirane. Quels ont été les sujets à l’ordre du jour ?

Plusieurs points étaient inscrits à l’ordre du jour dont, bien entendu, l’arrêté des comptes 2011 et le budget 2012. Mais il y a aussi le plan national pour le développement du haut et très haut débit au Maroc, les propositions de révision législative et règlementaire et des aspects en relation avec les missions de l’Agence.

On attendait avec impatience ce plan haut débit. Finalement qu’en sera-t-il ?

Le plan national pour le développement du haut et très haut débit au Maroc a été présenté au Conseil d’administration qui a pris des décisions concernant sa mise en œuvre.

Quand on dit plan haut débit, on parle de connexion filaire ou de tout type de connexion internet ?

Le haut débit peut être atteint par des technologies filaires (paire de cuivre, fibre optique) mais aussi par des technologies radio (WIFI, WIMAX, 3G et 4G).

Si bien que le haut débit concernera aussi près de 3 millions de Marocains qui ont une clé 3G. Mais, concrètement, c’est quoi le haut débit, c’est combien de Ko/s ?

Il n’y a pas de définition uniforme pour le haut débit. Pour un utilisateur la notion de débit est mesurée par rapport au confort d’utilisation qu’il obtient pour satisfaire ses besoins. A titre d’exemple, quand il accède à une vidéo en ligne, il souhaite la regarder sans coupure de même que quand il échange des messages sur un réseau social, il tient à l’instantanéité des échanges.

Il y a bien un débit minimal à respecter pour mériter l’appellation haut débit !

Certes. Dans le cadre de l’étude menée par l’ANRT, des approches ont été retenues. Ainsi, le haut débit est défini comme celui pouvant être atteint sur la base des principales infrastructures actuellement utilisées au Maroc, c’est-à-dire l’ADSL pour le fixe et la 3G pour le mobile. La limite du haut débit est considérée à 30 Mb/s, sachant que le débit minimal doit être de 2Mb/s.

Et le très haut débit donc…

Il est représenté par un débit supérieur à 30 Mb/s, correspondant aux services pouvant être atteints grâce à un accès fibre/VDSL sur le fixe ou la 4G pour le mobile.

On parle là, dans les deux cas, d’un débit théorique bien sûr…

Oui, mais à la différence près qu’il y a des seuils minimum imposés. Ainsi, avoir du haut débit signifie dépasser les 2Mbit/s et en aucun cas avoir un débit moindre. Pour le très haut débit la borne inférieure est de 30 Mbit/s

Il arrivera donc un jour où la connexion internet sera d’au moins 2 Mbit/s ! A quel horizon cela se fera-t-il ?

Dans certaines zones de forte urbanisation et là où le besoin se fait sentir, ça peut être à partir de 2014. Dans d’autres, il faudra attendre plus de temps. L’objectif étant que d’ici 10 ans, le haut débit devienne une norme généralisée et que n’importe quel abonné, où qu’il soit dans le pays, ait accès à un minimum de 2M/s.

Pendant ces dix ans qu’est-ce qui se passe ? On équipe, on investit, on change de technologie… ?

La mise en œuvre du plan haut et très haut débit sera concrétisée en deux phases. Celle que nous qualifions de «court terme» et celle dite de moyen et long terme. La première phase, celle à court terme, s’articule autour des éléments suivants : déploiement des technologies 4G ; ouverture de la bande Wifi aux opérateurs de télécommunications pour la fourniture de l’accès aux réseaux haut débit en Outdoor ; lancement de projets pilotes pour desservir des groupes d’habitations et/ou zones d’activité en fibre optique ; et enfin la fixation des modalités de raccordement des nouvelles constructions, habitations et zones d’activités aux infrastructures de télécommunication en fibre optique.

Concrètement, ça veut dire qu’à court terme il y a aura des licences 4G qui seront accordées ?

Oui, l’agence projette de lancer l’appel d’offres international en ce sens à l’automne 2012 et d’attribuer les licences début 2013 pour une opérationnalisation prévue fin 2013-début 2014.

Qui dit appel d’offres international dit aussi que le marché des télécoms pourrait compter un 4e opérateur qui ne ferait lui que de la 4G…

Oui, cela est possible. Si son offre est compétitive par rapport aux cahiers des charges fixés et par rapport à celle des autres concurrents en lice, il se verrait attribuer une licence. Nous avons l’obligation de nous plier aux règles de concurrence internationale, en fixant bien entendu notre cahier des charges spécifique selon les besoins du pays et l’intérêt de ses consommateurs.

Et ce haut débit en Outdoor ?

De manière très simplifiée, il s’agira d’ouvrir, pour les opérateurs, la possibilité à leurs clients réguliers ou occasionnels de bénéficier d’une connexion Wifi hors de leur domicile ou de leurs bureaux. C’est-à-dire dans la rue et les espaces publics.

Ça veut dire qu’à l’avenir on pourra acheter une carte wifi et avoir accès à l’internet partout en ville ?

Partout ! ça dépend des zones couvertes et il faut que les opérateurs y trouvent un intérêt commercial. Quant à l’achat d’une carte, il n’y a pas que cela. Par exemple, si vous êtes déjà client chez un opérateur, on peut supposer que votre téléphone ou ordinateur connecté 3G passe automatiquement en mode Wifi offert par le même opérateur, si cela vous permet d’avoir une meilleure connexion.

Quid de ces projets pilotes pour équiper les zones d’activité et d’habitation en fibre optique ou encore le projet de raccordement des nouvelles habitations ?

Nous partons d’un principe très simple. Le raccordement filaire, pour l’instant et par rapport à une transmission basée sur des ondes radio (hertzien, WiMAX, 3G, 4G), reste le meilleur moyen de transporter des données ou de la voix sans interférence et avec une capacité très importante. L’idée est, en accord avec les ministères concernés, de faire en sorte que les nouvelles zones d’urbanisation soient d’emblée équipées en fibre optique. Pour les communes et les promoteurs concernés, le surcoût est marginal, alors que quand une zone est déjà urbanisée, il revient plus cher de l’équiper, étant donné tous les travaux directs et indirects que cela engendre. Cela dit, pour les zones déjà existantes justement, nous allons lancer les projets pilotes dont j’ai parlé, il s’agira, pour les opérateurs intéressés, de couvrir en fibre optique des quartiers/communes déjà urbanisés pour pouvoir décupler leur capacités. Il devront donc y trouver leur compte en termes de retour sur investissement. Ces projets permettront aussi à l’ANRT de fixer les règles de partage dans un but d’optimisation des investissements.

Tout cela, dans un objectif de court terme. Quid des moyen et long terme ?

Attention, la généralisation du haut et très haut débit font également partie du moyen et long terme, de même que le déploiement de la 4G au niveau national. De manière globale, la deuxième phase, dont la mise en œuvre nécessite des analyses approfondies, est axée principalement autour du renforcement des infrastructures de télécommunications en fibre optique afin d’assurer une meilleure qualité de service des différents réseaux de données et une bonne connectivité des réseaux des différentes agglomérations nationales et des réseaux de collecte. De même, il est prévu une exploration des différentes solutions technologiques permettant l’accélération de la généralisation de l’accès aux réseaux haut débit à l’ensemble de la population et notamment celle située dans les zones éloignées.

Tout cela nécessite des investissements. L’Etat mettra-t-il la main à la poche ?

Tout d’abord, dans sa première phase, le plan national haut débit s’appuiera essentiellement sur des investissements privés pour couvrir les zones présentant un intérêt économique pour les opérateurs privés. C’est justement dans ce cadre que seront déployées les technologies de 4e génération. Ce déploiement sera assorti de conditions de couverture, de qualité de service. Pour ce qui est des zones pouvant ne pas présenter d’intérêt économique pour les opérateurs, je rappelle que l’état est intervenu de manière significative pour le déploiement des technologies GSM pour permettre l’accès aux services voix et internet bas débit dans les zones éloignées et difficiles d’accès. Rien que le programme PACTE qui a concerné près de 9 300 villages a mobilisé près de 1,4 milliard de dirhams sur quatre ans. Pour offrir à ces mêmes populations l’accès à l’internet, l’Etat mobilisera les moyens nécessaires comme il l’a fait par le passé. D’ailleurs, les travaux prévus pour le déploiement de la deuxième phase du plan haut débit porteront, entre autres, sur ce genre de sujet.

Ça veut dire que l’équipement en réseaux 4G de zones dépourvues d’intérêt commercial pourrait, à terme, faire partie du service universel…

Oui, tout comme l’agence a lancé des appels d’offres pour l’équipement de certaines zones enclavées en 2G, elle pourrait le faire pour couvrir ces zones en 3G et 4G à plus long terme.

Mettre en place le haut débit c’est bien mais encore faut-il que les réseaux ne soient pas saturés. Je pense notamment à la 3G qui connaît beaucoup de lenteur…
L’objectif du plan est justement de mettre en place les infrastructures permettant de décongestionner les réseaux et d’accompagner la croissance des utilisations internet.

La principale cause de congestion des réseaux 3G et même l’ADSL reste le téléchargement illimité. Or, rien dans la loi n’interdit aux opérateurs de facturer les paliers de téléchargement, sommes-nous entrés dans cette logique ?
C’est une tendance observée au niveau international et le Maroc ne devrait pas y échapper. Certains opérateurs ont d’ailleurs déjà commencé à limiter ou conditionner le volume de téléchargement en relation avec le prix. L’ANRT veille, toutefois, avec les opérateurs concernés, à ce que les utilisateurs soient bien informés et que les offres soient transparentes et lisibles.

Comment se positionne le Maroc par rapport à des pays comparables en termes de coût de connexion internet ? Comment se positionne-t-il en terme d’usage et de temps d’utilisation ?

Le Maroc fait figure de précurseur dans la région en terme d’usage mais de plus en plus aussi de pénétration de l’internet au sein des ménages marocains comme en témoignent les rapports qui sont publiés par différents organismes internationaux mais que vient aussi de confirmer l’enquête annuelle sur les usages des nouvelles technologies au sein des ménages et des entreprises (voir page suivante).

Avec 3,4 millions de lignes internet, à combien évalue-t-on la population des internautes aujourd’hui ?

Selon la dernière enquête menée par l’ANRT, le nombre d’internautes est estimé à environ 15 millions d’utilisateurs. Cette même enquête fait ressortir des résultats extrêmement encourageant quant à l’intérêt des ménages pour l’usage des nouvelles technologies. En effet, le taux de pénétration de l’internet dans les ménages a gagné 10 points en une année, passant de 25% à 35%. Dans les ménages urbains ce taux grimpe à 44%. Le taux d’équipement en ordinateurs a, quant à lui, atteint 39%, soit 5 points de plus qu’en 2010. Les ménages urbains sont mieux équipés avec un taux de 53% contre 14% pour le rural. Par ailleurs, pour la première fois depuis que l’ANRT réalise cette enquête, les 65% des ménages non équipés en internet placent le manque de besoin en tête par rapport au prix qui avait toujours été la principale motivation du non-équipement. Une telle évolution nous amène à réfléchir sérieusement sur la faiblesse du contenu ayant un intérêt pour nos concitoyens.

Revenons à ce qui va se passer au cours des mois à venir. Vous avez parlé de changement dans la réglementation…

Ils concernent la mission de régulation de l’agence. Trois points importants sont à signaler dans le projet de texte modificatif de la loi 24-96 qui régit le secteur. D’abord au niveau de la relation entre opérateurs et consommateurs qu’il s’agit de mieux clarifier dans le sens de protection des usagers, d’une meilleure connaissance de leurs droits et obligations, une meilleure information. Ensuite, au niveau du partage des infrastructures de télécoms, nous allons renforcer les conditions d’obligation.

Jusqu’à présent, ils n’étaient pas obligés de s’y plier ?

Si, l’obligation existe dans le texte actuel. Ce sont les conditions de cette obligation qui restent du domaine des relations commerciales entre opérateurs avec la possibilité de saisine de l’ANRT en cas de litige.

Et ce qui changera…

Avec le projet de loi présenté au gouvernement, les opérateurs seront tenus de publier, tous les deux ans, une liste des tarifs de «location» de leurs infrastructures, sachant que l’ANRT aura le pouvoir de réguler ces prix, s’ils sont trop excessifs, inadaptés ou anticoncurrentiels. Mieux, dans le cas d’une nouvelle infrastructure à bâtir, l’opérateur devra soumettre une proposition de co-investissement à ses concurrents. Si ces derniers ne sont pas intéressés, il gardera l’usage exclusif de cette infrastructure pendant trois ans. Faute d’une offre de co-investissement, il soumettra son infrastructure nouvellement déployée d’emblée au partage.

Vous parliez de trois changements importants dans la loi. Quel est le troisième ?

C’est un renforcement des capacités de sanctions de l’agence dans le but de plus d’efficacité en matière de régulation. Les expériences internationales montrent qu’en cas de sanction, le passage par la justice prend du temps alors que certaines infractions doivent être sanctionnées immédiatement.

Cela veut dire que l’agence sanctionnera?directement sans passer par la justice ?

Comme c’est le cas pour nombre de régulateurs en la matière dans les pays développés. Nous parlons ici, bien entendu, de sanctions pécuniaires. Dans le projet de loi proposé, l’agence prononcera directement les sanctions et elles auront un caractère exécutoire. L’opérateur sanctionné pourra recourir au tribunal administratif s’il s’estime lésé.

Source: lavieeco.com

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