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congo_internetLe Congo, comme la plupart des pays dans les années 90, a vu une croissance du secteur des télécommunications; mais la libéralisation du marché des télécommunications au Congo en 1997, année où le pays est passé du monopole de l’Office National des Postes et Télécomunications (ONPT) à un libre marché comprenant plusieurs opérateurs, ne s’est pas faite sans problèmes et le pays en souffre toujours. Le problème se situe à la fois au niveau de l’infrastructure et du cadre législatif, mais c’est la population congolaise qui subit les conséquences: 97% des Congolais n’ont pas accès à l’internet et les opérateurs de téléphonie cellulaire restent largement inefficaces. Comme dans plusieurs pays Africains, il a été difficile de mettre en place une politique de TIC cohérente. Une réforme à cet égard aura-t-elle une place dans ce nouveau cycle présidentiel, qui connaît une « période difficile » depuis ses débuts?

Des débuts difficiles

Lors de la libéralisation des télécommunications en 1997, une nouvelle structure a été créée pour remplacer l’ONPT, qui devenait de plus en plus inefficace. La guerre civile de 1997 à 1999 a entraîné des retards avant que la Société des télécommunications du Congo (SOTELCO) soit mise en place pour fournir des services de base (téléphone fixe, télégraphie). Ce nouvel opérateur public a ainsi eu le monopole de ces services et le marché est passé d’un monopole à un autre. Cette société est à ce jour incapable de fournir les services de base aux Congolais et il s’agit plutôt d’une régression généralisée du secteur des télécommunications sur une période de plus de dix ans, dite souvent « période difficile ».

Par souci d’arbitrage, un organe de régulation a été créé: la Direction Générale de l’Administration Centrale des Postes et Télécommunications (DGACPT). Mais celle-ci n’avait pas la possibilité d’assumer son mandat, d’autant plus qu’elle n’a qu’un rôle provisoire. Il n’y a donc toujours pas de séparation entre l’organe de régulation et l’autorité publique, ce qui crée des distorsions dans les conditions de la concurrence car la régulation ne garantit pas la séparation entre les fonctions de réglementation et d’exploitation des organismes de télécommunication. Les conditions de la concurrence dans ce secteur se trouvent entachées d’éléments monopolistiques. Par contre, en ce qui concerne la téléphonie mobile, l’introduction d’un troisième opérateur devrait encourager une baisse des prix et la concurrence.

L’infrastructure d’abord

Selon M. Luc Missidimbazi, ingénieur télécom et président de l’Association PRATIC au Congo, le cœur du problème se situe au niveau de l’infrastructure. Le déploiement de dorsales parallèlement à d’autres mesures de développement pourrait faciliter la tâche. Pour l’instant, la population dépend encore d’une connexion coûteuse par satellite, ce qui rend difficile la promotion de l’internet. Tel est le cas de plusieurs cafés internet, qui doivent souvent fermer leurs portes après quelques mois car trop peu de gens les fréquentent. Le manque de clientèle est dû à une mauvaise connexion et à des coûts faramineux. Dans certaines localités, l’internet revient à plus de 1000 Fcfa l’heure (soit environ 2 dollars US). Il s’agit non seulement d’un prix exorbitant dans un pays où le salaire minimum est de trois ou quatre dollars US par jour, mais comme il arrive que l’on passe une heure sans pouvoir attacher ou télécharger un fichier, il faut souvent payer pour un service qui n’arrive même pas à répondre aux besoins. Ceux qui n’ont pas les moyens de payer l’internet ou de se déplacer doivent s’en passer complètement.

Toutefois, l’intégration de la fibre optique est imminente. Le projet SAT3/WACS, un projet d’interconnexion par fibre optique, devrait être mis en œuvre en 2009 et sera opérationnel en 2011. Ce projet de déploiement d’infrastructure de réseau à fibre optique à l’échelle du continent Africain nécessite un investissement de 15 millions de dollars par État. Pour sa part, le Congo a déjà versé dix millions de dollars mais il reste encore la construction des autoroutes de communication afin de relier l’intérieur du pays aux grands centres.

Un cadre législatif mal adapté

Mais l’accès n’est pas le seul défi au Congo. Selon M. Roméo Mbengu d’ Azur Développement, une ONG congolaise qui œuvre dans le domaine des TIC pour le développement, la loi sur les TIC serait mal adaptée. L’incapacité de la législation actuelle à répondre aux préoccupations des opérateurs privés se manifeste de plusieurs façons, notamment la concurrence déloyale de certains opérateurs privés de la République démocratique du Congo, qui exercent au Congo Brazzaville sans autorisation. Il peut aussi arriver que les consommateurs abonnés à Brazzaville, se retrouvent dans le réseau Zain de Kinshasa et sont incapables de communiquer ou de recevoir des appels, ce qui peut durer une journée entière. De plus, tout comme au Bénin, il est fréquent de se retrouver avec plusieurs cartes SIM, dont certaines ne durent que quelques jours, le temps d’une promotion.

M. Mbengu ajoute que le cadre réglementaire est aussi inadapté au niveau des taxes que doivent payer les opérateurs, ce qui peut avoir des conséquences sur les populations, en particulier l’absence d’internet à haut débit à un prix abordable. Cela est dû à plusieurs raisons: manque d’infrastructure à l’échelle du pays, enclavement total des zones rurales; coût de navigation élevé, et absence quasi-totale de points d’échanges entre les fournisseurs d’accès internet du Congo, malgré certaines tentatives de regrouper plusieurs fournisseurs et décideurs de ce domaine.

En décembre 2008, un atelier de réflexion national a été organisé auquel ont participé le gouvernement congolais et la Banque mondiale, SOTELCO, l’autorité de régulation, PRATIC et d’autres acteurs. Cet atelier a porté sur le déploiement de l’infrastructure haut débit, sur la mise en place d’un Comité national de coordination et d’une « feuille de route » pour une politique nationale et une cyber-stratégie pour le pays.Ce sera au nouveau gouvernement de mettre en œuvre cette stratégie qui reste bloquée au niveau législatif : « Tout est là pour faire avancer et pour mettre en place [la loi], mais il reste beaucoup d’aspects juridiques qui ne sont pas appliqués. Il revient au secrétariat du gouvernement de faire valider ces recommandations auprès du parlement et du président, mais çela tarde d’après le ministère », ajoute Missidimbazi.

Pour l’assainissement durable du secteur

Au-delà de la mise en place d’infrastructures, plusieurs changements sont aussi nécessaires au niveau législatif. Dans un rapport produit par Azur Développent dans le cadre du projet CICEWA d’APC, M. Mbengou et ses collègues insistent sur les changements qui doivent être apportés, à la fois au niveau gouvernemental et de la société civile. Il faut formuler des stratégies pour la mise en place des infrastructures de télécommunication et adopter des politiques de développement et de gestion de ces infrastructures.Il faut également définir un cadre réglementaire souple qui favorise l’épanouissement du secteur des télécommunications et bien entendu créer un organe de régulation des télécommunications autonome et indépendant, ce qui favoriserait une réduction des coûts d’interconnexion entre opérateurs. Quant à la société civile, c’est à elle d’apporter un soutien technique, d’appuyer le développement des infrastructures de télécommunication et de veiller à l’applicaiton des normes internationales au secteur, de demander une réduction des prix et de faciliter la formation en matière de TIC.

Mais c’est aussi aux Conglais de débattre de la place des TIC au Congo et de faire entendre leurs préoccupations, afin d’élaborer une politique des TIC légitime et fonctionnelle. Une enquête menée par PRATIC en 2008 montre que la population est de plus en plus sensibilisée aux TIC et que les particuliers et les entreprises attendent une politique qui leur permettra d’avoir accès.

Il reste maintenant au gouvernement récemment réélu de Dennis Sassou Nguesso de prendre en considération ces recommandations et surtout d’élire la bonne personne. M. Missidimbazi explique que les hommes politiques sont maintenant plus sensibilisés à l’importance des TIC pour le développement économique et social, comme pour les secteurs de l’éducation et la santé. Le cadre est maintenant prêt, un président qui comprend déjà ces enjeux est essentiel à la poursuite du processus.

Note : Cet article a été écrit dans le cadre du projet Communiquer pour influer en Afrique Centrale, de l’Est et de l’Ouest par APC, afin de promouvoir le plaidoyer pour un accès abordable aux TICs pour tous. CICEWA cherche à définir les obstacles politiques qui préviennent un accès abordable à l’infrastructure des TIC en Afrique et à demander leur élimination afin de créer une plateforme solide pour la connectivité sous-régionale en Afrique de l’Est, de l’Ouest et Centrale.

[readon1 url=”http://www.apc.org”]Source : apc.org[/readon1]

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