Benhamadi_Algerie_Telecom
Benhamadi_Algerie_TelecomMoussa Benhamadi, PDG d’Algérie Télécom, revient dans cet entretien sur le différend avec Eepad et évoque les projets du groupe, dont l’évolution vers la gratuité du téléphone fixe pour encourager Internet. Bonne nouvelle africaine : le projet de liaison fibre optique Alger-Abuja progresse.

Les Afriques : Y a-t-il encore une place pour un deuxième opérateur de téléphonie fixe en Algérie ?

MB : Une deuxième licence fixe en Algérie n’est plus viable parce que la technologie évolue très vite. Aucun opérateur ne peut rivaliser sur notre marché avec Algérie Télécom, qui dispose d’un réseau très important. Il faudrait arriver à financer le manque à gagner de la téléphonie fixe par l’accès Internet à haut débit. L’accès téléphonique gratuit à l’abonné est une option essentielle. Si on ne parvient pas à offrir cet accès gratuit, on risque d’en payer le prix. Nous sommes en cours de migration de notre réseau téléphonique classique vers le réseau IP, il faut préparer l’avenir. Nous avons lancé, également, une opération qui permet à tout citoyen de récupérer une ligne fixe qu’il a résiliée, en contrepartie d’un abonnement Internet gratuit pendant une année.

LA : Qu’en est-il du nouveau plan d’organisation d’Algérie Télécom ?

MB : Nous investissons pour aller vers les nouvelles générations réseau (NGN). Un appel d’offre international été lancé dernièrement pour l’acquisition de 400 000 lignes MSAN, permettant d’acheminer les données et les communications à très haut débit. La deuxième action porte sur la densification et l’exploitation du réseau, en utilisant la fibre optique dont dispose Sonelgaz et Sonatrach. Nous avons signé, d’ailleurs, des conventions de partenariat avec ces deux entreprises pour utiliser ces réseaux. Il est prévu de réaliser 4000 km de fibre optique en partenariat avec Sonelgaz d’ici fin 2009.

Nous comptons renforcer davantage notre réseau de communication à l’international en lançant prochainement une troisième liaison en fibre optique entre Oran et Valence (Espagne). La consultation sera probablement lancée la semaine prochaine. Des pourparlers ont été engagés avec la SNTF (Société nationale de transport ferroviaire) pour l’exploitation de son réseau en fibre optique. Nous agissons ainsi pour la Fédération des ressources nationales en fibre optique.

LA : L’exploitation du câble sous-marin en fibre optique reliant Alger-Marseille-Annaba, appartenant à Orascom Télécom Algérie, vous intéresse-t-il ?

MB : Du fait de la réglementation en vigueur, Orascom Télécom Algérie n’a, pour l’instant, pas le droit d’exploiter ce câble sous-marin. Nous restons ouverts à toute forme de partenariat qui pourrait être bénéfique à AT. Si la réglementation autorise ce genre d’opération, nous sommes évidemment intéressés. Nous comptons, aujourd’hui, deux liaisons internationales, dont Alger-Annaba-Palma, à travers le câble sous-marin SM84.

Le projet de liaison en fibre optique Alger-Abuja (Nigeria), inscrit dans le cadre du NEPAD, progresse. Il reliera l’Algérie au Nigeria en passant par plusieurs pays africains, dont le Mali et le Niger. Nous avons réalisé plus de 2200 km, jusqu’à la frontière avec le Mali et le Niger. Le projet permettra de réaliser une autoroute numérique traversant le continent, afin de canaliser le trafic téléphonique intra-africain. Un autre projet existe pour créer des points de présence en Europe, en vue d’optimiser nos charges de locations des liens à l’international et canaliser les appels internationaux destinés à l’Algérie. Nous envisageons de créer des points de présence en Afrique en partenariat avec des opérateurs africains.

LA : Qu’en est-il du trafic téléphonique international « gris » organisé via le réseau de téléphonie sur IP ?

MB : C’est du vol, beaucoup de trafic téléphonique qui devait revenir à Algérie Télécom a été détourné. En juin 2008, 16 millions de minutes ont été comptabilisées contre 30 millions de minutes en juin 2009. On a pu, donc, récupérer 14 millions de minutes en l’espace d’une année. La Banque d’Algérie, en tant qu’institution chargée du rapatriement des devises, perd beaucoup d’argent dans ce trafic gris. Plus grave, ce trafic peut être un moyen de blanchiment d’argent, de financement du terrorisme ou du banditisme. Cela pénalise l’économie nationale et pose des problèmes de sécurité. Beaucoup d’opérateurs de téléphonie sur Internet (VoIP) ont disparu. Le prix de la minute internationale vers l’Algérie est passé de 9 à 3 DA. Nous perdons au moins 10 millions de DA par mois sur la base d’un prix de 5 DA la minute.

LA : Où en est le contentieux entre l’opérateur privé Eepad et Algérie Télécom ?

MB : Eepad s’est engagé en 2007 dans un échéancier à payer une dette de 1,3 milliard de DA. Il prévoyait un règlement moyen mensuel de 134 millions de DA qui n’a été que partiellement honoré. A fin 2008, la créance a atteint le seuil de 2,6 milliards de DA. Eepad s’est engagé à travers un autre échéancier à payer 50 millions de DA par mois en sus des arriérés de mensualités de janvier à mars 2008, qui s’élèvent à 430 millions de DA. Au 30 avril 2009, l’Eepad ne s’est pas acquitté de sa dette, nous avons coupé les connexions pendant trois à quatre jours. Elles ont été rétablies, car Eepad a sollicité un report du paiement. Sur instruction du Conseil d’administration, nous avons transmis le dossier de l’Eepad au Premier ministre et au ministère de tutelle. Il n’était plus de notre ressort d’accorder un échéancier supplémentaire à l’Eepad. Le 26 mai 2009, l’Eepad n’a présenté qu’un chèque de 50 millions de DA sans s’acquitter des 430 millions de DA prévus dans le dernier échéancier.

Entretien réalisé par Narimane Mahmoudi, Alger
[readon1 url=”http://www.lesafriques.com”]Source : lesafriques.com[/readon1]

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